8 janvier 2012 7 08 /01 /janvier /2012 18:50

 

Mardi 2 janvier, Le Monde publiait un article de Michel Rocard (ami de Bougival Ensemble) et Pierre Larrouturou, économiste, sur le financement de la dette des pays européens.

Comme à leur habitude, ils mettent le doigt sur des faits économiques méconnus, agitent des idées nouvelles et amènent des solutions iconoclastes et de bon sens. Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement.  Et les mots pour le dire viennent aisément...

Nous soumettons l'article complet  à votre réflexion.

 

Ce sont des chiffres incroyables. On savait déjà que, fin 2008, George Bush et Henry Paulson avaient mis sur la table 700 milliards de dollars (540 milliards d'euros) pour sauver les banques américaines. Une somme colossale. Mais un juge américain a récemment donné raison aux journalistes de Bloomberg qui demandaient à leur banque centrale d'être transparente sur l'aide qu'elle avait apportée elle-même au système bancaire.

Au même moment, dans de nombreux pays, les peuples souffrent des plans d'austérité imposés par des gouvernements auxquels les marchés financiers n'acceptent plus de prêter quelques milliards à des taux d'intérêt inférieurs à 6, 7 ou 9 % ! Asphyxiés par de tels taux d'intérêt, les gouvernements sont "obligés" debloquer les retraites, les allocations familiales ou les salaires des fonctionnaires et de couper dans les investissements, ce qui accroît le chômage et va nous faire plonger bientôt dans une récession très grave.

Est-il normal que, en cas de crise, les banques privées, qui se financent habituellement à 1 % auprès des banques centrales, puissent bénéficier de taux à 0,01 %, mais que, en cas de crise, certains Etats soient obligés au contraire de payer des taux 600 ou 800 fois plus élevés ? "Etre gouverné par l'argent organisé est aussi dangereux que par le crime organisé", affirmait Roosevelt. Il avait raison. Nous sommes en train de vivre une crise du capitalisme dérégulé qui peut être suicidaire pour notre civilisation. Comme l'écrivent Edgar Morin et Stéphane Hessel dans Le Chemin de l'espérance (Fayard, 2011), nos sociétés doivent choisir : la métamorphose ou la mort ?

Allons-nous attendre qu'il soit trop tard pour ouvrir les yeux ? Allons-nous attendre qu'il soit trop tard pour comprendre la gravité de la crise et choisir ensemble la métamorphose, avant que nos sociétés ne se disloquent ? Nous n'avons pas la possibilité ici de développer les dix ou quinze réformes concrètes qui rendraient possible cette métamorphose. Nous voulons seulement montrer qu'il est possible de donner tort à Paul Krugman quand il explique que l'Europe s'enferme dans une"spirale de la mort". Comment donner de l'oxygène à nos finances publiques ? Comment agir sans modifier les traités, ce qui demandera des mois de travail et deviendra impossible si l'Europe est de plus en plus détestée par les peuples ?

Angela Merkel a raison de dire que rien ne doit encourager les gouvernements à continuer la fuite en avant. Mais l'essentiel des sommes que nos Etats empruntent sur les marchés financiers concerne des dettes anciennes. En 2012, la France doit emprunter quelque 400 milliards : 100 milliards qui correspondent au déficit du budget (qui serait quasi nul si on annulait les baisses d'impôts octroyées depuis dix ans) et 300 milliards qui correspondent à de vieilles dettes, qui arrivent à échéance et que nous sommes incapables de rembourser si nous ne nous sommes pas réendettés pour les mêmes montants quelques heures avant de les rembourser.

Faire payer des taux d'intérêt colossaux pour des dettes accumulées il y a cinq ou dix ans ne participe pas à responsabiliser les gouvernements mais à asphyxier nos économies au seul profit de quelques banques privées : sous prétexte qu'il y a un risque, elles prêtent à des taux très élevés, tout en sachant qu'il n'y a sans doute aucun risque réel, puisque le Fonds européen de stabilité financière (FESF) est là pour garantir la solvabilité des Etats emprunteurs...

Il faut en finir avec le deux poids, deux mesures : en nous inspirant de ce qu'a fait la banque centrale américaine pour sauver le système financier, nous proposons que la "vieille dette" de nos Etats puisse être refinancée à des taux proches de 0 %.

Il n'est pas besoin de modifier les traités européens pour mettre en oeuvre cette idée : certes, la Banque centrale européenne (BCE) n'est pas autorisée à prêter aux Etats membres, mais elle peut prêter sans limite aux organismes publics de crédit (article 21.3 du statut du système européen des banques centrales) et aux organisations internationales (article 23 du même statut). Elle peut donc prêter à 0,01 % à la Banque européenne d'investissement (BEI) ou à la Caisse des dépôts, qui, elles, peuvent prêter à 0,02 % aux Etats qui s'endettent pour rembourser leurs vieilles dettes.

Rien n'empêche de mettre en place de tels financements dès janvier ! On ne le dit pas assez : le budget de l'Italie présente un excédent primaire. Il serait donc à l'équilibre si l'Italie ne devait pas payer des frais financiers de plus en plus élevés. Faut-il laisser l'Italie sombrer dans la récession et la crise politique, ou faut-il accepter de mettre fin aux rentes des banques privées ? La réponse devrait être évidente pour qui agit en faveur du bien commun.

Le rôle que les traités donnent à la BCE est de veiller à la stabilité des prix. Comment peut-elle rester sans réagir quand certains pays voient le prix de leurs bons du Trésor doubler ou tripler en quelques mois ? La BCE doit aussi veiller à la stabilité de nos économies. Comment peut-elle rester sans agir quand le prix de la dette menace de nous faire tomber dans une récession "plus grave que celle de 1930", d'après le gouverneur de la Banque d'Angleterre ?

Si l'on s'en tient aux traités, rien n'interdit à la BCE d'agir avec force pour faire baisser le prix de la dette. Non seulement rien ne lui interdit d'agir, mais tout l'incite à le faire. Si la BCE est fidèle aux traités, elle doit tout faire pour que diminue le prix de la dette publique. De l'avis général, c'est l'inflation la plus inquiétante !

En 1989, après la chute du Mur, il a suffi d'un mois à Helmut KohlFrançois Mitterrand et aux autres chefs d'Etat européens pour décider de créer la monnaie unique. Après quatre ans de crise, qu'attendent encore nos dirigeants pour donner de l'oxygène à nos finances publiques ? Le mécanisme que nous proposons pourrait s'appliquer immédiatement, aussi bien pour diminuer le coût de la dette ancienne que pour financer des investissements fondamentaux pour notre avenir, comme un plan européen d'économie d'énergie.

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Ceux qui demandent la négociation d'un nouveau traité européen ont raison : avec les pays qui le veulent, il faut construire une Europe politique, capable d'agir sur la mondialisation ; une Europe vraiment démocratique comme le proposaient déjà Wolfgang Schäuble et Karl Lamers en 1994 ou Joschka Fischer en 2000. Il faut un traité de convergence sociale et une vraie gouvernance économique.

Tout cela est indispensable. Mais aucun nouveau traité ne pourra être adopté si notre continent s'enfonce dans

Michel Rocard est aussi le président du conseil d'orientation scientifique de Terra Nova depuis 2008.

 Pierre Larrouturou est aussi l'auteur de "Pour éviter le krach ultime" (Nova Editions, 256 p., 15€) une "spirale de la mort" et que les citoyens en viennent à détester tout ce qui vient de Bruxelles. L'urgence est d'envoyer aux peuples un signal très clair : l'Europe n'est pas aux mains des lobbies financiers. Elle est au service des citoyens.

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21 février 2010 7 21 /02 /février /2010 11:01

 



L'article ci-dessous résume briévement la réformes des collectivités locales. Le projet de loi a été adopté en première lecture par le Sénat le 4 février 2010. Cette réforme impactera notre communauté de commnunes: les coteaux de Seine.


Collectivités locales : ce que contient la réforme Sarkozy


Création des conseillers territoriaux et de métropoles régionales, achèvement de l'intercommunalité, clarification des compétences, Nicolas Sarkozy dévoile, mardi 20 octobre, en fin de matinée, les grandes lignes de la réforme territoriale initée par la commission Balladur. Même si elle se situe en deçà des propositions de la commission, elle comporte certains changements majeurs dans l'organisation territoriale.


La création de conseillers territoriaux. Ces nouveaux élus, au nombre de 3000, remplaceront les conseillers régionaux et généraux (actuellement 6000 au total) et seront élus pour la première fois en mars 2014. Ils devraient siéger dans les deux assemblées. Un nouveau mode de scrutin devrait être mis en place : 80 % seront élus au scrutin majoritaire à un tour dans des cantons redessinés. Les 20 % restant seront élus au scrutin de liste à la proportionnelle. Parallèlement, le gouvernement présentera un texte mettant un terme en 2014 aux mandats des conseillers généraux et des conseillers régionaux qui seront élus d'ici là. Le gouvernement fixera par ordonnance le nombre de conseillers territoriaux dans chaque département, hormis ceux de Corse, qui n'est pas concernée, et d'outre-mer, qui sera concernée dans un deuxième temps.


Les compétences des départements et des régions. Selon le gouvernement, les grands blocs de compétence des deux assemblées seront maintenus, même si la réforme prévoit une redéfinition des spécialisations de l'une et de l'autre. Le champ d'intervention des collectivités devrait donc être limité. Une loi doit fixer la liste des compétences qui seront exclusivement exercées par le conseil général ou le conseil régional. Seules les communes garderont une compétence générale.


De nouvelles métropoles régionales. Les grandes agglomérations (au moins 450 000 habitants) pourront opter pour cette nouvelle structure intercommunale. Elles bénéficieront de compétences élargies par rapport aux communautés urbaines et devraient percevoir la totalité de la fiscalité locale. Ce qui laisse planer une inconnue sur leurs ressources, compte tenu de la réforme, en cours, de la taxe professionnelle. Une partie des fonctionnaires départementaux dépendrait de la métropole. Cette dernière pourrait remplacer la communauté urbaine et exercer des compétences d'une commune, ou se substituer à la région si les collectivités concernées le souhaitent. Mais la création de ce nouvel échelon ne se fera que par décision des communes concernées, dont la plupart sont tenues aujourd'hui par le PS, opposé au projet global.


Des intercommunalités plus lisibles ? A partir de 2014, les électeurs désigneront, lors des municipales, leurs candidats aux intercommunalités. Les prétendants à la fonction de conseiller communautaire figureront en tête des listes des candidats à la municipale dans les communes de plus de 500 habitants. La carte de France des structures intercommunales devra être clarifiée et les préfets pourront en modifier les contours à partir de 2013.


Un mode de scrutin modifié dans les petites villes. Le scrutin de liste sera abaissé à 500 habitants au lieu de 3 500 actuellement. Le gouvernement espère favoriser ainsi la parité dans les conseils municipaux.


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